Škoda Felicia Fun : La plage s’invite au bureau d’étude

Vingt-cinq ans plus tard, alors que l’automobile moderne parle de kilowattheures et de logiciels comme d’autres parlent de littérature, un designer de Mladá Boleslav a décidé de réanimer la bête. Non pas pour relancer une production de série, n’exagérons rien, mais pour répondre à une question simple : que donnerait la Felicia Fun si elle était dessinée aujourd’hui, avec les codes du fameux style Modern Solid de Škoda ?

Une icône revisitée

La série « Icons Get a Makeover » a justement ce rôle : exhumer les bizarreries du passé pour les rhabiller aux goûts du jour. Et autant le dire, il fallait oser. Parce que la Felicia Fun, c’était un pick-up qui cachait, derrière sa benne, deux strapontins en plein air. Oui, vous avez bien lu : une cloison arrière coulissait pour libérer deux places supplémentaires. On pouvait donc transporter ses copains de plage comme on range des parasols, au mépris total des standards de confort… et probablement de sécurité.

À l’époque, tout était jaune. La carrosserie, forcément, et jusqu’aux détails de finition déclinés en jaune, orange ou vert selon l’humeur. Autant dire que dans une rue grise d’Europe centrale, le pick-up avait des airs de perroquet tropical. Seulement 4 216 exemplaires ont été assemblés dans l’usine de Kvasiny. Autant dire que croiser une Felicia Fun aujourd’hui relève du miracle, ou de la brocante automobile.

Julien, la plage et l’IA

L’idée de la ressortir n’est pas venue d’un service marketing en quête de buzz, mais de Julien Petitseigneur, designer français installé chez Škoda. Pendant son temps libre – ce qui en dit long sur ses loisirs – il s’est mis à redessiner la Fun comme d’autres refont leur cuisine IKEA. Il s’est même laissé aller à tester des outils d’intelligence artificielle pour poser les premières esquisses, avant de reprendre tout à la main. Parce qu’on ne confie pas une icône à un algorithme, même si celui-ci sait colorier en jaune.

Julien raconte avoir travaillé chaque soir trois heures durant, pendant deux semaines, histoire de donner forme à cette plage mobile version 2025. De quoi rappeler qu’un designer, même en dehors des heures ouvrées, ne sait pas s’empêcher de dessiner des voitures.

Modern Solid sauce cocktail des années 1990

Alors, à quoi ressemble la nouvelle Felicia Fun ? À un mélange improbable entre un concept-car Vision 7S et un bar de plage des années 1990. À l’avant, on retrouve la fameuse Tech-Deck Face chère au design Modern Solid, assortie de phares LED en T. Jusque-là, tout va bien. Mais à l’arrière, le designer s’est autorisé un clin d’œil : des feux roses reliés par une barre lumineuse. Oui, du rose. Pas un accident de Photoshop, mais un choix assumé, repris aussi dans le logo, les vitres teintées, les jantes et quelques détails de carrosserie. Un hommage direct à cette époque où le fluo n’était pas une insulte.

Les proportions, elles, respectent les canons d’aujourd’hui : empattement élargi, gros pneus, protections noires sur les bas de caisse et les pare-chocs. Le jaune domine toujours, comme une règle intangible de la Felicia Fun. Après tout, une Fun sans jaune, c’est un peu comme un mojito sans menthe.

L’intérieur : rétro-gaming et tableau de bord cathodique

Julien ne s’est pas contenté de l’extérieur. L’habitacle a lui aussi droit à son revival. Au lieu d’un banal écran OLED, il imagine une planche de bord façon écran cathodique, avec des graphismes dignes d’une console 16 bits. L’idée n’est pas de rivaliser avec les systèmes multimédia modernes, mais de replonger directement dans l’ambiance des années 1990. Le genre de détail qui fait sourire, même si personne ne voudrait vraiment retaper Street Fighter II entre deux trajets.

Une Felicia qui ne roulera jamais

Important à rappeler : cette Felicia Fun modernisée n’a aucune vocation à rejoindre un catalogue. C’est un exercice de style, une respiration dans un univers automobile où chaque gramme de CO₂ est disséqué. Ici, pas de motorisation annoncée, pas de batterie de 77 kWh, pas de promesse d’autonomie. Juste un hommage à une époque où l’on construisait des voitures pour le plaisir de choquer les voisins.

La Felicia Fun originelle n’avait pas vocation à faire des volumes. Elle fut une curiosité, une fantaisie, une carte postale roulante de la fin des années 1990. Et c’est probablement pour ça qu’elle revient aujourd’hui en image, plutôt qu’en concession.