Car oui, l’usine Toyota Motor Manufacturing Czech (TMMCZ), jusqu’ici connue pour assembler des Aygo X et des Yaris hybrides, va se doter d’un nouvel appendice. On parle de 21 000 m² supplémentaires, des ateliers flambant neufs pour souder, peindre et surtout assembler des batteries. On croirait presque à l’ouverture d’un nouveau supermarché, sauf qu’ici, à la caisse, ce sont 245 nouveaux emplois qui passeront.
Il faut dire que la République tchèque n’a pas ménagé ses efforts pour séduire le géant japonais. Le gouvernement a sorti le chéquier avec un investissement de 64 millions d’euros pour l’usine de batteries. De quoi montrer aux voisins allemands et polonais que Prague n’a pas l’intention de laisser filer un morceau de gâteau industriel. En retour, les retombées sont estimées à 250 millions d’euros pour l’économie locale. Le genre de calcul qui donne le sourire aux ministres de l’industrie… et qui fera froncer les sourcils à quelques contribuables.
Petr Fiala, Premier ministre tchèque, a même pris la peine de rappeler que l’automobile représente 10 % du PIB du pays. Dix pour cent. Autrement dit, si un Tchèque sur dix mangeait une soupe à la tomate, elle aurait sans doute un petit goût de pot d’échappement.
Ce BEV tchèque n’est pas un caprice improvisé. Toyota déroule sa stratégie « multi-technologies », une formule un peu vague qui consiste à dire qu’on garde un pied dans chaque monde : l’hybride, l’hydrogène, et désormais le 100 % électrique made in Europe. Objectif affiché : neutralité carbone d’ici 2040. On se doute que les dirigeants japonais ne tiendront pas une bougie dans les mains pour prouver leur sincérité, mais plutôt des bilans chiffrés.
Le site de Kolín n’est pas un inconnu dans cette stratégie. Depuis 2002, plus de 4,5 millions de voitures y sont sorties des lignes. On y a vu naître l’Aygo première du nom, dans une coentreprise avec PSA, puis les générations suivantes. En 2021, Toyota a pris le contrôle complet du site et s’est offert une petite forteresse industrielle au cœur de l’Europe. Aujourd’hui, avec 3 200 salariés et 65 % des pièces sourcées localement, l’usine fait figure de locomotive économique pour la Bohême centrale.
Évidemment, Toyota n’a pas jugé utile de nous dire à quoi ressemblera ce nouveau modèle électrique. Secret bien gardé, ou simple stratégie marketing pour tenir les journalistes en haleine ? En attendant, on peut spéculer : SUV compact, berline pragmatique, ou peut-être un crossover qui fera semblant d’être tout à la fois. Après tout, c’est devenu un sport national dans l’industrie auto que de brouiller les cartes des segments.
Ce qui est certain, c’est que le futur BEV viendra gonfler la capacité de production du site, déjà calibrée pour 220 000 véhicules par an. Et comme la majorité des pièces viendront de fournisseurs locaux, l’impact ne se limitera pas aux portails de l’usine. C’est tout un écosystème qui en profitera.
Ce n’est pas la première fois que Toyota sort la calculette pour Kolín. Petit rappel des épisodes précédents :
Entre 2002 et 2005, 1,069 milliard d’euros investis pour construire le site et lancer l’Aygo.
Entre 2020 et 2024, 251 millions d’euros supplémentaires pour préparer la Yaris et l’Aygo X sur plateforme TNGA.
Total avant 2025 : 1,32 milliard d’euros.
Et voilà qu’on rajoute encore 680 millions. On est à la limite du feuilleton financier, où chaque saison coûte plus cher que la précédente, mais attire toujours plus de spectateurs.
Avec la création en 2024 d’une méga plateforme logistique pour distribuer les Toyota et Lexus vers six marchés d’Europe centrale, Kolín s’impose comme un carrefour stratégique. L’usine devient bien plus qu’un simple site de production : c’est une plaque tournante, un QG logistique, et désormais une vitrine électrique.
Alors oui, on pourrait ironiser en disant qu’il s’agit surtout de béton, d’acier et de subventions. Mais derrière, il y a aussi une bataille bien réelle pour l’emploi, la compétitivité et l’avenir industriel d’un pays. Les 245 embauches annoncées ne feront pas la une des journaux économiques mondiaux, mais pour Kolín et sa région, elles valent sans doute autant que la sortie d’un nouveau modèle chez Ferrari.
2023 15353 km Automatique Diesel
2018 74171 km Automatique Diesel